Edouard De Keyser
Tour du monde en voile depuis Bruxelles
Rencontre avec cet étonnant navigateur qui, cet automne, tentera un tour du monde en solitaire, sans escale ni recours aux énergies fossiles. Un projet audacieux qui a commencé... au BRYC !
C’est l’histoire d’un homme qui n’en pouvait plus. Un Bruxellois, après avoir entamé des études de médecine puis devenu informaticien indépendant, mais fanatique de voile, qui rêvait de grands espaces et qui s’est retrouvé confronté à la dureté de la grande crise mondiale de 2008, quand les banques se sont effondrées.
Sauvé par la mer
Pour se sauver, et sauver sa famille, Edouard De Keyser emmène sa femme et ses deux enfants encore tout petits dans un voyage sabbatique de deux ans dans les eaux du Pacifique, des Galapagos et de la Polynésie. « Ma femme et moi voulions nous éloigner des fracas d’un monde en crise. À notre retour, j’ai encore travaillé comme chef d’entreprise pendant 12 ans puis j’ai tout vendu, écœuré, épuisé. Puis nous avons vécu un incendie et cela a fait “clic” dans ma tête. Il fallait que je fasse quelque chose, sinon j’étais mort. Sans un sou, j’ai repris mon bâton d’entrepreneur et j’ai imaginé un nouveau projet. C’est cette fois-ci qu’il s’agirait d'allier passion et profession dans un projet avec du sens et du sel. »
Ce petit bout d’homme, animé d’une force intérieure exceptionnelle et qui a toujours tout fait par passion, jette alors toutes ses forces dans son grand projet, le Global Solo Challenge, un tour du monde en solitaire sans escale et sans recourir aux énergies fossiles. Le départ est fixé à la mi-septembre 2023 au port de La Corogne en Espagne. C’est également là qu’Edouard bouclera son tour du monde quelque 5 mois plus tard. Mais avant cela, il faudra affronter les trois grands caps mythiques – Horn, Bonne Espérance et Leeuwin – ainsi que l’Antarctique !
« C’est l’Everest de la mer ! Moins de deux cents marins l’ont réalisé. Je veux être le premier Belge sur la liste ! Et aussi le premier à le faire sans recourir à aucune énergie fossile ! Rien d’autre que le vent, le soleil et des batteries de récupération 100% reconditionnées. Et ce projet commence au BRYC ! »
Depuis, bien aidé par l’enthousiasme qu’il draine, il est « à fond dedans » ! Et les planètes s’alignent. Cet énorme défi a tapé dans l’œil de Bertrand Piccard, le psychiatre- astrophysicien et chasseur de records, le père du Solar Impulse, qui n’a pas ménagé ses efforts pour lui ouvrir toutes les portes. Fort de ce soutien et de celui du roi Philippe, Edouard De Keyser veut apporter ses connaissances et son énergie à la lutte contre le changement climatique qui menace la planète. Mais malgré ses penchants marins, il reste les pieds sur terre. « Mon premier objectif est d’arriver de l’autre côté, et en un morceau de préférence. » Même s’il l’avoue avec un grand sourire « Mon bateau est potentiellement gagnant. Ce sera la bagarre, mais ça reste un défi, un jeu, plus qu’une compétition. »
Puis, il y aura un après. « J’ai cinquante-sept ans, je ne suis pas loin de la retraite. » Le rêve qu’il partage avec son épouse prend tout doucement forme : s’installer en Bretagne pour créer une maison d’hôtes face à cette mer qu’il aime tant avec un voilier au bout de la jetée. Dormir, ce sera pour plus tard.
Les Piccard,
Pioneering spirit for life !
Bertrand Piccard et la Belgique, c’est une vieille histoire. Elle a commencé avec son grand-père Auguste, premier homme dans la stratosphère, (qui a servi de modèle à Hergé pour le professeur Tournesol). Puis son père Jacques, premier homme à toucher le fond des océans. Bertrand, lui, a effectué le premier vol autour de la terre avec Solar Impulse, un avion n’utilisant aucune énergie fossile. C’est cet esprit de pionnier qui l’a amené à soutenir le projet Solar Wind d’Édouard de Keyser. « Il va faire la même chose que moi, mais sur la mer. Edouard est lui aussi un pionnier. Ceux qui veulent changer les paradigmes sont pris pour des fous. Il faut un peu de temps pour comprendre qu’ils ont raison. »
Le projet Solar Wind le remplit de joie. « Les solutions existent, l’écologie devient excitante et fédératrice. C’est le narratif que je cherche à promouvoir et le projet d’Edouard rencontre tout cela, c’est magnifique ! » Pour Bertrand Piccard, l’équation est simple : les écologistes doivent faire alliance avec les industriels, il faut en finir avec les clivages, tout le monde sera gagnant. C’est là que son activité de psychiatre entre en jeu. « Concilier les inconciliables. C’est aussi ça, ma mission. En travaillant ensemble, tout le monde sera gagnant. » Bertrand Piccard, une énergie inépuisable !